Un regard dénudé des choses
Et si la nudité m’était contée? À travers «Regarde-moi nue», l’ouvrage de Fodlyne André de son nom de plume Lou, on parvient aisément à comprendre les dessous du dessus d’une femme passionnée de se montrer…
Avec 13 chapitres pour exprimer ce que d’autres préfèrent taire, alors que la véracité des faits traduise le silence le plus éloquent. En lisant Regarde-Moi Nue, on découvre des espaces jamais conquis par la lucidité d’une cécité plurielle. En pénétrant les arcanes du souvenir de l’auteure, on dénote une soumission acceptée par la perception de l’observateur animée du désir d’interpréter et de comprendre les soubresauts de la vie courante :
Je suis la somme de toutes mes insécurités.
Ceci étant dit, l’auteure a choisi de se mettre à nu. Pour une fois, pour toutes. Ô, quel pari, quel enjeu, quel gageure, difficile de vouloir traduire ce que l’on ressent sans vouloir en dire! Maintenant, le lectorat peut s’offrir une occasion de fouiller jusqu’aux entrailles les faits et gestes qui émaillent notre quotidien. Ainsi, le fil de tout un cheminement se déroule à nos yeux :
Je me glisse à côté de son oreille droite et lui prononce l’ordre le plus doux qu’il lui ait été donné de recevoir : « Fais-moi l’amour!»
On est parti à la découverte d’une semence commencée pour entendre les paroles muettes. La lecture invite à aller au-delà du mutisme en vue de retrouver l’en deçà des énigmes. En y allant, les voiles du mystère de l’écriture s’effacent pour donner la place au spectacle de l’indicible. Une écriture teintée du coloris de l’originalité, mais transpercée de flèches d’un discours tordu. La sudation de l’auteure transgresse les normes de la fluidité qui épousent l’inspiration bien transmise. Pourtant, on connaît la bonne foi de l’écrivain, désireux de plaire :
J’adore sentir ton regard pervers me pénétrer, m’hypnotiser…
J’aime te savoir avide de ma chair, fiévreux de me posséder
Beaucoup d’emprunts au créole façonnent, dans une espèce de couleur locale, cet ouvrage apparemment dénué de sens. Les caprices fantaisistes des femmes transpirent à n’en plus finir. L’invitation s’entache de retenus parsemés sur la voie d’une pénétration véritable de l’œuvre. À la croisée des chapitres et des mots, on découvre des perspectives liées à la trajectoire de l’auteure. Plusieurs indices soulèvent les voiles d’un écrit inspiré des faits et surtout du vécu émaillé d’interrogations de plus d’un. Ce n’est point par hasard que le ton personnel s’emploie. Il est question de mettre en valeur un soi vu dans le prisme d’un miroir à facettes parfois divergentes. On doit donc regarder sans scillement les images qui, sous nos yeux, expriment les non-dits de l’aventure humaine :
Je brûle de plusieurs feux en même temps. Je ne sais pas ce qui en moi a pris le coup le plus dur : ma fierté, mon intimité ou mes sentiments…
Tout compte fait, il faut admettre que ce recueil de nouvelles brise un silence trop longtemps enfoui dans nos tabous. On n’a point besoin de procéder au déshabillement. Il suffit de se laisser pénétrer les arcanes de l’intimité pour s’enfouir dans les sentiers d’un univers marqué par une sincérité jamais prise à défaut. Il en est ainsi. Lisez sans perdre de temps cet ouvrage qui en dit plus que son titre.
Jean Antoine ARISMA
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